Toute une histoire |PV Lyz, Amarrah

Il faisait nuit noire, seules, vaillantes idiotes, les étoiles fièrement accompagnée de la lune éclairaient mollement les cieux. Il devait approcher des deux heures du matin. Et une nuit de plus, je fuyais mon dortoir, refusant volontairement le peu de sommeil qu'on m'avait cédé. Je n'y arrivais pas. J'avais pourtant un ordre: une nuit complète par semaine. Mais j'avais du mal à tenir. La peur me tenaillait. Et entrer dans mon dortoir était devenu douloureux. Surtout que l'atmosphère qui y régnait n'avait pas changé, toujours cette insouciance et cette indifférence. Je la supportais de moins en moins.
J'étais fatiguée, harrassée, crevée... Mon corps fourbu se trainait comme la loque que j'étais devenue. Je parvenais tant bien que mal à dissimuler mes cernes violacés et profondes, ainsi que mon teint crayeux. Mais j'avais l'air pitoyable. Et le sort, pour être maintenu dans la journée me coûtais beaucoup d'énergie. Que je ne récupérais presque pas. Que je ne voulais pas récupérer.
Pour occuper mes nuits, je déambulais dans le château, parlais parfois à quelques fantômes (même si j'évitais Peeves le plus possible), jouais aux chats et à la souris avec Rusard, Miss teigne et les préfets (soient-ils en chefs ou non). La tour d'Astronomie où j'allais avant, durant mes nuits sans sommeil me rebutais. Je n'y allais plus que pour les cours, et encore, parfois, je sêchais.
Alors je me réfugiais dans une salle de cours et assise sur une table, près de la fenêtre, je passais des heures à fixer le paysage, l'esprit vide. J'oubliais alors le temps, la fatigue, moi-même...
C'est ce que je faisais quand une silhouette me surpris.
"Mince, gillée..."
Je ne dis pas un mot au cas où on ne m'aurait pas reconnue, comme ça, je pouvais toujours m'enfuir sans être sanctionnée.

2.24
Les chiffres rouge criard avaient semblé agresser mes yeux lourds de fatigue et j’avais soupiré. Depuis quelques nuits, j’avais pris la mauvaise habitude de faire des cauchemars. Toujours le même : ma sœur en train de crever comme une chienne. Et moi, sa propres sœur, je la regardais s’éteindre sans faire le moindre geste pour l’aider. Je ne bougeais pas, je restais plantée à côté d’elle, souriant comme si je n’avais pas Laïla en train de souffrir le martyr sous mes yeux. Et quand enfin, son agonie était terminée, je me réveillais, haletante et couverte de sueur, des larmes me brûlant les paupières. D’habitude, je restais allongée dans mon lit, les yeux grand ouverts jusqu’à ce que le sommeil revienne enfin, mais ce soir j’étouffais. J’avais besoin d’air. Je sentais ma cage thoracique se compresser par intervalles et j’avais tellement mal au cœur que j’aurais voulu m’ouvrir la poitrine pour l’en arracher une bonne fois pour toutes. C’était insupportable. Invivable. Sur la pointe des pieds, j’avais alors quitté les appartements de ma maison, encore tremblante. Je me mis alors à déambuler dans les couloirs de l’école, encore en débardeur fin et bas de pyjama. Et le froid qui glissait sur ma peau m’apaisait, me calmait. Je n’avais pas tellement froid, c’était juste agréable de se sentir respirer un peu mieux que dans la moiteur du dortoir des Serdaigles. Mais la tranquillité fut de courte durée. Un feulement agressif me stoppa en pleine marche.

Un chat ?

Chat. Chat. Chat. J’essayai de me rappeler pourquoi le mot chat avait une connotation péjorative dans mon esprit. J’aimais bien les chats, enfin normalement. Chat. Chat. Chat.

Qu’est-ce que j’ai entendu à propos des chats, dernièrement ?

J’avais eu des échos de quelques Serdaigles selon lesquels il fallait se méfier d’un certain chat. Je crois. Miss Teigne. Je crois.

La chatte du surveillant !

Ni une ni deux, je partis en courant, un peu n’importe où. Tant que je ne rencontrais personne, tout irait bien pour moi et mes fesses. Complètement paniquée, je m’engouffrai par la première porte que je trouvai sur mon chemin. Peut être pas très intelligent, mais j’avais toujours eu un mal fou à bien réagir en plein stress. Le souffle désordonné, je pris le temps d’observer où j’étais tombée. Une salle de classe.

Bon, déjà c’est pas un placard à balais. C’est déjà ça.

Et alors que j’allais m’effondrer contre la porte, je remarquai une silhouette se dessinant dans la lumière faiblarde de la lune. Je plissai les yeux. Elle ne bougeait même pas. Je rêvais ou quoi ? Je m’approchai à pas de loup, hésitant entre réellement voir qui c’était et partir en courant dans le sens inverse. Pourtant un jeu de couleur, à peine esquissé, me fit me tendre toute entière.

Lyzz’ ? murmurai-je assez fort pour qu’elle m’entende. C’est toi ?

-Lyzz’ ? C’est toi ?

"Nan, c'est le pape"
Je retenais cette réplique singlante et l'observais. J'avais immédiatement reconnue sa voix. J'avais aussi remarqu" sa tenue et son souffle court. De même que ses tremblements. Elle était affolée et l'hyposthèse la plus plausible était une mauvaise rencontre.
Mon sang ne fit qu'un tours. Je jouais. Et elle m'amenais mes poursuivants sur un plateau d'argents. Rapide et silencieuse, je courais vers elle, évitant les tables soigneusements. Je l'éttrapais pas le bras et la plaquais rudement contre le mur avant de lui lancer un sort. je lançais le même sur moi et me plaçais prés d'elle, lui chuchotant, menaçante:

-Pas un mot, pas un geste. Tu respires à peine.

Immobile. Je ne bougeais pas. Respirais à peine. Je n'eu même pas le temps de compter une minutes que la porte de la salle s'ouvrit à la volée dévoilant la silhouette de Rusard. Il scrutta la pièce pendant une bonne minute puis ne remaquant rien d'inhabituelle, il sortit.
J'attendais encore quelques secondes, puis, sûre d'être tranquille, je me décollais du mur et levais les sort. Sans la regarder je regagnais ma place:

-Bonsoir Amarrah.

Alors que je prononçais ces mots d'une voix blanche, je réalisais une chose. Mon corps n'étais plus dissimulé. Bah, tant pis, elle ne remarquerai rien. J'en étais persuadée.

Je n’eus même pas le temps d’attendre une réponse de sa part. À peine m’avait-elle jeté un regard que Lyzz’ se précipité sur moi, aussi furtive qu’une ombre, et m’attrapa par le bras avant de me plaquer contre l’un des murs de la salle avec une force que je ne lui soupçonnais pas. J’étouffai une plainte en me mordant la langue lorsque je sentis mon dos à moitié nu heurter la pierre gelée. J’avais le cœur totalement désordonné, je le sentais qui se répercutait un peu partout dans ma poitrine, mais jamais au bon endroit. Mon sang bourdonna à mes tempes un instant, assourdissant. Pour la première fois depuis que je l’avais rencontrée - et encore nous n’avions fait que nous croiser depuis notre conversation à la Volière - Lyzz’ me faisait peur. Vraiment. J’aurais pu en trembler si sa main autour de mon bras qui l’enserrait à me couper le sang ne me paralysait pas de la tête aux pieds.

Pas un mot, pas un geste. Tu respires à peine.

L’ordre, bien qu’à peine prononcé, claqua pourtant comme un fouet sur ma peau et ma peur redoubla. J’en avais presque la nausée. Mais j’obtempérai, ne sachant pas vraiment ce dont Lyzz’ était capable dans un état comme le sien. Et je crus m’évanouir lorsque je la vis murmurer quelques sorts qu’elle me lança, sans vergogne.

Mais qu’est-ce qu’elle me fait là ?

J’aurais pu me défendre sans doute, bien que je ne sache pas vraiment son niveau, mais j’étais tellement paniquée que je ne pouvais pas faire le moindre geste. Je ne compris sa manœuvre que lorsque la porte grinça sur ses gonds dans un bruit sec. La frêle silhouette du gardien se détacha à peine dans le clair obscur, reconnaissable. Il inspecta la pièce et je priai pour qu’il ne nous trouve pas. Bredouille, il referma la porte, je m’empêchai de souffler de soulagement. Raide comme un piquet, j’attendis que Lyzz’ bouge en première pour simplement oser lever le petit doigt après qu’elle ait levé les sorts sur chacune d’entre nous. Elle regagna sa place, sans m’accorder un seul regard.

Bonsoir Amarrah, lâcha-t-elle enfin, une fois assise.

J’hésitai une seconde à m’approcher puis me décidai à déplacer une chaise juste en face d’elle. Au moins elle serait forcée de me regarder un minimum.

Je… je suis désolée, murmurai-je d’une voix blanche. C’est de ma faute si tu as failli te faire prendre par le gardien. Il… Sa chatte a dû me suivre.

Je baissai les yeux sur mes mains jointes sur mes genoux à peine couverts.

Mais merci de m’avoir sauvé la mise. C’est sympa de ta part.

Je me fis violence pour relever la tête vers Lyzz’ et voulus lui adresser un sourire de remerciement, échouai à une pitoyable grimace lorsque je vis l’était dans lequel elle était. Le teint crayeux, elle avait les yeux vitreux soulignés de cernes violacées que je vis noires dans la pénombre. Et même ses cheveux d’habitude si flamboyants de couleurs m’apparurent ternes. Dans le rayon de lumière projetée par la lune, Lyzz’ n’avait plus rien d’une être vivant. Elle ressemblait à un cadavre ambulant. À une espèce de zombie en pleine décomposition.

Lyzz’, soufflai-je effarée, Merlin mais qu’est-ce que t’as fait ? On dirait que t’as pas dormi depuis des nuits et des nuits !

Incertaine de sa réaction, j’esquissai un imperceptible mouvement de recul, au cas où elle aurait décidé de m’étrangler par excès de rage.

-Je… je suis désolée. C’est de ma faute si tu as failli te faire prendre par le gardien. Il… Sa chatte a dû me suivre. Mais merci de m’avoir sauvé la mise. C’est sympa de ta part.

Je n'avais que faire de ses excuses. apreés tout, se divertissements m'avait bien amusée. Elle ne me devais aucune excuse, je ne l'avais pas fais pour elle:

-Oui, j'avais crû remarquer. Pas besoin de me remercier, c'est rien. Tu as mal?

-Lyzz’. Merlin mais qu’est-ce que t’as fait ? On dirait que t’as pas dormi depuis des nuits et des nuits !

Pourquoi c'était-elle rapprochée de moi? Ne pouvait-elle pas tout simplement partir? Elle ne m'aimait pas et je ne la connaissait pas. Rien ne nous liais, sa présence ici n'était pas nécéssaire et en plus, elle se permettait des réflexions alors que je venais de sauver ses fesses...Aucunes gratitude. je fis un effort pour ne rien laisser transparaître sur mon visage et je plantais mon regard dans le sien:

-Je ne dors jamais. Amarrah, tu dis quoique se soit à Jun, Sakura ou Jiro, et je raconte ta petite aventure nocturne au directeur...

Je préférais ne pas trop en dire me contentant du minimum. Il était hors de question que les personnes qui me restaient s'inquiète encore plus pour moi que ce qu'elles le faisaient déjà. Je refusais ça. On prenait déjà soin de moi, dans une certaine mesure tout du moins. Et ça ne la regardais pas vraiment.

Trop choquée par son allure de pleine décrépitude, je ne répondis pas à son semblant de sollicitude. Je ne pensais pas que savoir qi j’avais mal ou non l’intéresserait grandement. Je la vis froncer les sourcils, mécontente, avant que son visage ne redevienne aussi lisse qu’une pierre polie.

Je ne dors jamais, asséna-t-elle, vrillant un regard peu amène dans le mien. Amarrah, tu dis quoique ce soit à Jun, Sakura ou Jiro, et je raconte ta petite aventure nocturne au directeur…

Son ton était sans réplique. Et sa petite démonstration d’il y a peu me passa l’envie de lui rétorquer que je n’avais que faire de ses ordres à la con. Je ne savais pas vraiment comment réagir. Devais-je lui dire ma façon de penser ? Ou lui certifier sur l’honneur que je ne dirai jamais rien, même sous la torture ? Je décidai que non. Non, je n’avais aucun ordre à recevoir de sa part et qu’elle parle à Papy Dumby si elle le désirait, je n’en avais que faire. Au point où j’en étais, peu m’importait une retenue. Et surtout j’en avais marre qu’elle ne s’adresse à moi que de cette façon depuis le début. Elle n’avait pas à me faire payer quelque chose dont j’ignorais même jusqu’à l’existence.

Ce n’est peut être pas si éloigné que ça finalement…

Je serrai un peu plus les dents lorsque l’idée que Lyzz’ me fasse payer pour la mort de ma sœur - et de sa meilleure amie de surcroit - me vint à l’esprit. Je sentis la rage me tordre le ventre, brûlante. Elle n’avait pas le droit de faire ça. Non, elle n’avait pas le droit de m’enfoncer plus que je ne l’étais déjà parce qu’elle-même souffrait. Ça n’était pas juste. Je n’avais pas à payer pour sa souffrance, je payais déjà assez pour la mienne. Chaque joue, je m’en mordais les doigts. Je payais déjà assez, je n’avais pas besoin de ça. Les larmes me brouillèrent quelque peu la vue et je me serais giflée d’avoir la vois si tremblante lorsque je lui répondis :

Écoute, je sais que ça ne doit pas être facile pour toi de me voir vivre dans ce château alors que je ressemble tant à Laïla. Je sais ce que tu endures, je la vois elle chaque fois que je me regarde dans la glace ! Chaque fois que je jette un coup d’œil à mon reflet c’est le sien qui apparait ! Et je me mets à espérer que c’est parce qu’elle est là, juste à côté de moi, que je vois son visage. Tu ne sais rien de ce que j’éprouve et je ne prétends pas être sûre de le savoir pour toi mais une seule chose est vraie : elle me manque. Au moins autant qu’elle te manque à toi. Et son absence me fait crever à petit feu. Et toi, une chose qui est sûre, tu décrépis à vue d’œil.

Ma voix s’érailla sur les derniers mots. J’avais la tête qui tournait un peu trop vite. Et, surtout, je sentais la culpabilité arriver comme une vague géante qui me faucha. J’avais été trop loin, encore une fois. Je me renfonçai dans mon siège, les yeux baissés.

Excuse moi, soufflai-je. Mais je ne te demande pas de m’aimer, juste de respecter le fait que je ressemble comme deux gouttes d’eau à Laïla. Et que je le vis aussi mal que toi. Mais par respect pour ceux que tu considères comme tes amis, ajoutai-je un peu plus cassante, tu devrais leur montrer que tu as besoin de leur aide. Et pas leur jeter de la poudre aux yeux juste pour ne pas les inquiéter. Leur amitié le vaut bien, non ?

Écoute, je sais que ça ne doit pas être facile pour toi de me voir vivre dans ce château alors que je ressemble tant à Laïla. Je sais ce que tu endures, je la vois elle chaque fois que je me regarde dans la glace ! Chaque fois que je jette un coup d’œil à mon reflet c’est le sien qui apparait ! Et je me mets à espérer que c’est parce qu’elle est là, juste à côté de moi, que je vois son visage. Tu ne sais rien de ce que j’éprouve et je ne prétends pas être sûre de le savoir pour toi mais une seule chose est vraie : elle me manque. Au moins autant qu’elle te manque à toi. Et son absence me fait crever à petit feu. Et toi, une chose qui est sûre, tu décrépis à vue d’œil. Excuse moi. Mais je ne te demande pas de m’aimer, juste de respecter le fait que je ressemble comme deux gouttes d’eau à Laïla. Et que je le vis aussi mal que toi. Mais par respect pour ceux que tu considères comme tes amis, tu devrais leur montrer que tu as besoin de leur aide. Et pas leur jeter de la poudre aux yeux juste pour ne pas les inquiéter. Leur amitié le vaut bien, non ?

J'écoutais son monologue. Je tentais tant bien que mal de refouler la douleur et la colère. J'écoutais, le visage impassible. Elle croyait me connaître. elle croyait savoir. Moi, je savais que cette tirade avait du lui couter du courage. Savoir qu'elle souffrais n'était pas nouveau pour moi. Je le savais déjà. Depuis le début.c'était tellement visible, tellement normale. Je le savais déjà. Elle ne m'apprenais rien de nouveau. Ce qui me mettais hors de moi c'étais qu'elle prétendais tout savoir de moi. Cette assurance de me connaître me plongeais dans une rage folle que j'avais du mal à contenir. Mais je n'avais pas le choix, répondre à celà était débile. Elle avait mal, elle aussi:

-Tu n'es pas Laïla. Tu lui ressemble, c'est certain, mais je n'ai jamais vu elle en toi. Tu es sa jumelle que tu lui ressemble est naturelle. Mais tu n'es pas elle. Je l'ai compris. Je le sais. Depuis le début. Tu n'as rien à te faire pardonner. Que je t'aime, te respect ou te haïsse n'a aucune sorte d'importance. Tu me demande mon respect pour ta ressemblance avec ta soeur. Soit, tu l'as. En retour, je te demanderai d'arrêter de me donner des conseils. Tu crois savoir. Tu ne sais rien.

Je ne voulais pas monologuer. Et même si l'envie de tout lui déballer me tordais le ventre, elle n'avait pas à savoir. Nous n'étiions rien l'une pour l'autre. Juste deux étudiantes qui essayent de remonter la pente. Juste ça.

L’air mauvais, Lyzz’ lâcha, dédaigneuse :

Tu n'es pas Laïla. Tu lui ressembles, c'est certain, mais je n'ai jamais vu elle en toi. Tu es sa jumelle, que tu lui ressembles est naturel. Mais tu n'es pas elle. Je l'ai compris. Je le sais. Depuis le début. Tu n'as rien à te faire pardonner. Que je t'aime, te respecte ou te haïsse n'a aucune sorte d'importance. Tu me demandes mon respect pour ta ressemblance avec ta sœur. Soit, tu l'as. En retour, je te demanderais d'arrêter de me donner des conseils. Tu crois savoir. Tu ne sais rien.

C’était comme une puissante gifle qui venait me terrasser. Elle ne mâchait pas ses mots, elle était crue dans son parler comme dans ses actes. Lyzz’ avait tout de l’écorchée vive, brute de décoffrage. Mais, sans savoir pourquoi, j’avais quand même mal. Peut être parce qu’elle aussi ressemblait un peu à Laïla par son côté forte tête déchirée de haine et de douleur.

Quand notre mère est morte, nous n’avions plus personne sur qui compter à part nous deux. Comme une seule et unique personne. Mais Laïla s’est enfermée plus loin dans la douleur que moi, elle n’allait pas bien. Et si moi j’ai pu vite remonter la pente, ma sœur elle, n’a jamais supporté la douleur de la perte de notre mère. Elle était bien trop fragile. Et j’ai pas su l’aider à ce moment là, j’avais bien trop peur de plonger moi-même et de ne pas pouvoir en sortir. Nous sortir de là dedans. J’étais celle qui était forte, qui ne pleurait jamais. Mais ce rôle n’était qu’une vaste blague, qu’une comédie.

Et la seule au courant avait été ma jumelle. C’était pour ça qu’elle n’avait rien dit le jour où je lui avais annoncé que je partais. Que je la laissais seule. Elle était bien trop gentille pour me retenir dans son monde de douleur et de ténèbres. Elle m’avait laissé partir. Et moi, dès lors, j’avais été bouffée par le remord. C’était peut être aussi pour ça que j’étais venue ici, à Poudlard. Je me sentis sourire avec nostalgie.

Tu lui ressembles aussi, tu sais, murmurai-je doucement. Je retrouve un peu d’elle en toi. Alors, non, je ne te connais peut-être pas toi, mais je connaissais ma sœur. Et ma sœur mordait souvent pour se défendre. La technique de l’animal blessé qui blesse à son tour. Je ne sais rien dis-tu, je ne demande qu’à apprendre. Je pense pouvoir comprendre, je ne suis pas idiote et encore moins insensible, vois tu.

Je lui adressai un regard qui se voulait entendu.

Laïla aurait détesté que tu te laisses crever à petit feu par sa faute. Tu en es consciente de ça ?

-Tu lui ressembles aussi, tu sais. Je retrouve un peu d’elle en toi. Alors, non, je ne te connais peut-être pas toi, mais je connaissais ma sœur. Et ma sœur mordait souvent pour se défendre. La technique de l’animal blessé qui blesse à son tour. Je ne sais rien dis-tu, je ne demande qu’à apprendre. Je pense pouvoir comprendre, je ne suis pas idiote et encore moins insensible, vois tu.
Laïla aurait détesté que tu te laisses crever à petit feu par sa faute. Tu en es consciente de ça ?

S'il y avait une chose que je détestais, c'était bien de faire parler les morts. Les morts ne parlait pas, ne voulais rien. Ils se contentais de bouffer les pissenlits par la racines, rien de plus. Laïla aurais voulut beaucoup de chose. Tout comme j'en voulais beaucoup aussi. Mais les envies ne sont pas forcément faitent pour être réalisées. Sinon, je n'aurais pas manqué de souffle, sinon, j'aurais compris plutôt...:

-Pourquoi crois-tu que nous avons été amies elle et moi? Forcément que nous nous ressemblions un peu. Tu n'as rien à gagner à apprendre. Nous étions amies, elle est morte. Point. Pourquoi vouloir t'occuper de moi? Tu ferais mieux de te concentrer sur toi. D'autre part, je n'ai pas le souvenir de t'avoir traité d'idiote ou d'insensible. Ni de t'avoir traité EN idiote ou insensible.
Ce que Laïla aurait voulut, elle seule le sait. J'aurais voulu qu'elle ne meurt pas. ça ne change rien au fait qu'elle l'est.

La réplique fut sans appel.

Pourquoi crois-tu que nous avons été amies elle et moi ? Forcément que nous nous ressemblions un peu. Tu n'as rien à gagner à apprendre. Nous étions amies, elle est morte. Point. Pourquoi vouloir t'occuper de moi ? Tu ferais mieux de te concentrer sur toi. D'autre part, je n'ai pas le souvenir de t'avoir traité d'idiote ou d'insensible. Ni de t'avoir traité EN idiote ou insensible. Ce que Laïla aurait voulu, elle seule le sait. J'aurais voulu qu'elle ne meure pas. Ça ne change rien au fait qu'elle l'est.

Sonnée, je me raidis sur ma chaise. Était-elle toujours comme ça ? Elle soufflait le chaud, puis le froid pour finir sur une note tiède. Avec elle, on ne savait sur quel pied danser. Et elle retournait vos propres mots contre vous. Pour vous discréditer.

Laïla, c’est quoi le putain de mode d’emploi ?

Je fixai Lyzz’ durant un moment, cherchant ce que ma sœur avait bien pu trouver chez elle qui méritait qu’on s’y intéresse. Comment ma sœur supportait-elle ça ? L’image que m’avait donnée Laïla était totalement différente de celle que j’avais sous les yeux. Ce n’était pas possible ; on aurait dit deux personnes différentes. Je vis Lyzz’ sur la défensive, encore plus qu’elle ne l’était déjà. Aussi décidai-je de changer de sujet. Je ne voulais pas la mettre plus en colère, je ne tenais pas à subir un nouveau sort. Je soupirai.

Lyzz’, depuis quand n’as-tu pas mangé un repas équilibré ? Et depuis quand n’as-tu pas fait une nuit complète ? Même à l’aide de tes bonbons magiques là.

Je souris, sans vraiment le vouloir.

Oui, je suis au courant. Laïla m’en avait parlé de ton petit truc pour pouvoir dormir. Elle m’avait raconté aussi commet tu t’en étais servi contre elle pour la faire dormir de force. Elle n’avait pas apprécié, ris-je doucement.

Moi ça me faisait sourire tout du moins ; mais je n’étais jamais sûre de rien en ce qui concernait la meilleure amie de ma sœur.

Lyzz’, depuis quand n’as-tu pas mangé un repas équilibré ? Et depuis quand n’as-tu pas fait une nuit complète ? Même à l’aide de tes bonbons magiques là.Oui, je suis au courant. Laïla m’en avait parlé de ton petit truc pour pouvoir dormir. Elle m’avait raconté aussi commet tu t’en étais servi contre elle pour la faire dormir de force. Elle n’avait pas apprécié

-Une semaine pour les deux. Et je tiens à préciser que c'étais de sa faute. Si elle n'avait pas dormit, elle aurait fait une crise de nerf.

J'étais un peu étonnée. Laïla semblait avoir gardé un bon contact avec sa jumelle. Même si elle m'en parlait peu. Encore une chose que j'ignorais. Me souvenir de cet instant provoquait en moi un mélange étrange de douleur et de chaleur. Je n'avais pas le choix, pour les repas et les nuits. Si je ne respectais pas ce minimum, je n'avais pas ma recharge de bonbons. Quelque part, je me demandais pourquoi elle me demandais ça. Pourquoi elle s'intéressait à moi? Est-ce que c'était une sorte de curiositée morbide? Et surtout, qu'est-ce qu'elle savait de moi? Je n'hésitais d'ailleurs pas à la lui poser. Je devais savoir:

-Que sais-tu donc d'autre sur moi?

Une semaine qu’elle n’avait pas mangé un vrai repas. Une semaine qu’elle n’avait pas passé une nuit complète. Elle devait être épuisée ! Comment tenait-elle encore debout ? Où trouvait-elle la force de rester toujours la tête haute malgré son état de fatigue profonde ? Personne ne voyait donc rien dans sa maison ? Personne ne s’apercevait qu’elle était en train de se perdre ? Ils étaient tous aveugles ma parole ! Et Dumbledore, pourquoi ne faisait-il rien ? À part sourire comme le dernier des idiots, que savait-il faire d’autre celui là ? Bizarrement, je me sentais en colère contre ses camarades alors que je ne les connaissais pas. Alors que je ne la connaissais pas. Lyzz’ était comme une étrangère pou moi - non elle était une étrangère pour moi, ni plus ni moins - et pourtant je me sentais révoltée devant tant de connerie. Non mais elle avait quoi dans la tête cette fille là ? Elle était cinglée ma parole !

Ou peut être juste folle de douleur.

Ce qui était très probable. Mais si elle continuait ainsi, elle aussi allait finir six pieds sous terre. Et quelque chose en moi me disait que je ne pouvais pas le permettre. Pas parce que Lyzz’ m’importait, mais parce que Laïla n’aurait pas aimé ça. Et tant pis si Lyzz’ et moi n’étions pas d’accord sur ce point là, je devais respecter la mémoire de ma sœur et ce qu’elle avait entrepris de son vivant. Et de là où elle était, si Laïla voyait sa meilleure amie, elle devait en être très malheureuse.

Bon sang, mais pourquoi l’avoir laissée aussi ? Hein ? Tu ne voyais pas qu’elle avait besoin de toi ? Tu croyais quoi ? Qu’elle s’en sortirait comme si de rien n’était ? Qu’elle n’en souffrirait pas ? Qu’elle ne ressentirait rien en apprenant que sa meilleure amie était morte ? Tu n’es qu’une sale égoïste Laïla ! Ce que tu as fait est dégueulasse et égoïste !

Je n’avais jamais vraiment éprouvé de rancœur par rapport à la perte de ma sœur, pas jusqu’à maintenant que je voyais l’état dans lequel était sa meilleure amie. Et la colère semblait me brûler les entrailles, j’avais du mal à la contrôler. J’aurais voulu secouer Lyzz’ comme un prunier pour qu’elle se bouge enfin. Lui crier que ce qu’avait Laïla était impardonnable et qu’au lieu de se laisser mourir elle devait plutôt aller cracher sur la tombe de sa soi-disant meilleure amie. Mais je savais bien au fond que ça ne servirait à rien. Salir ainsi le nom de Laïla ne l’aiderait en rien à remonter la pente. Elle n’avait pas besoin de ça, elle devait déjà être assez en colère pour ça ; non elle n’avait pas besoin que je rajoute ma haine à la sienne. Il lui fallait de l’aide. Et du temps. Beaucoup de temps.

Que sais-tu donc d'autre sur moi ?

Ne te méprends pas Lyzz’, répondis-je après un moment. Si Laïla m’envoyait lettre sur lettre, la réciproque n’était pas vrai. Pas tout le temps en tout cas. Et à vrai dire, je ne sais pas tellement de choses de toi. Pas au sens propre du terme. Ce que Laïla m’écrivait, c’était plutôt comment elle ressentait les choses vis-à-vis de toi. Toujours vis-à-vis de toi. Son monde tournait autour de toi, il gravitait dans ton orbite. Et au final j’ai juste pu me forger une image de toi à travers ses yeux à elle. Ceux de ma sœur. Je ne te voyais qu’à travers elle. Dans le fond, elle faisait aussi comme si moi je te connaissais aussi bien qu’elle, ce qui est loin d’être le cas.

Lyzz’ me sembla sur le point d’exploser. Mais la pénombre et le fait que son visage redevenait impassible par intermittences ne m’aidaient pas vraiment à en être sûre. Je la voyais seulement qui se bornait à fixer le paysage par la fenêtre.

Je vois.

Plutôt maigre comme réponse.

Indécise, je ne savais quelle réaction avoir à ça. Peut être que je parlais trop. Ça la gênait sans doute de m’entendre causer, surtout de Laïla. Elle devait avoir mal, terriblement mal. Et je me sentais idiote de déballer mon sac comme ça, alors que c’était tout aussi douloureux pour elle que pour moi. J’avais pensé à quoi moi ? Qu’elle me parlerait de ma sœur bien gentiment, comme ça, comme moi je le faisais depuis dix minutes ? J’étais stupide, vraiment. Lyzz’ n’était pas encore prête à ça. Elle n’était pas la bonne personne sur qui j’aurais pu vomir toute ma peine. Mais y’avait-il seulement une bonne personne pour ce genre de choses ? Intérieurement, je poussai un soupir. J’étais stupide, vraiment.

Tu viens souvent ici le soir ? demandai-je, espérant secrètement faire se détendre l’atmosphère.

Question conne.

Oui, je m’en doutais un peu. Il était stupide demander ça à quelqu’un qui ne dort quasiment jamais. Elle devait venir à chaque fois qu’elle passait une nuit blanche. Mais j’avais rien trouvé d’autre. Merlin, qu’elle devait me trouver idiote !

En même temps, je n’ai pas envie de lui plaire. Ou un peu. Juste un peu. Parce que Laïla tenait à elle. Parce que Lyzz’ a besoin d’aide. Elle est au bord du gouffre et elle ne semble même pas le voir. Et les autres non plus d’ailleurs. Quelle hypocrisie là dedans… Seulement elle ne se laisse pas faire. Pas facilement.

-Tu viens souvent ici le soir ?

J'étais pour le moins surprise de la question, je tournais mon regard dans le sien, j'étais une fille polie, et il étais polie de regarder son interlocuteur en face. Une question simple. Une réponse simple. ça m'allait comme question. Pas de peine, pas de sujet douloureux. Pourtant, je pensais à Laïla. C'étais sa soeur que j'avais en face de moi. Elle tenait à Laïla à sa manière. Et je pense que pour ça, je devais peut petre l'aider un minimum. Juste un peu. Je devais bien encore avoir cette force quelque part...Et si je me concentrais sur elle, peut être qu'elle me laisserai un peu tranquil...Qui sait:

-ça dépend. D'habitude, je joue avec Rusard et les préfets. Mais aprés minuit, les préfets rentre et ce n'est plus drôle. Alors je viens ici. Avant, j'allais à la Tour d'Astronomie. C'est un chouette endroit, tu y a déjà été? En dehord des cours je veux dire.

Ça dépend. D'habitude, je joue avec Rusard et les préfets. Mais après minuit, les préfets rentrent et ce n'est plus drôle. Alors je viens ici. Avant, j'allais à la Tour d'Astronomie. C'est un chouette endroit, tu y a déjà été ? En dehors des cours je veux dire.

Wow.

J’eus du mal à me retenir de lui demander si c’était bien à moi qu’elle s’adressait. Pas un sarcasme. Pas une parole mauvaise. Rien. Juste des mots, mis les uns à la suite des autres qui forment une phrase tout ce qu’il y avait de plus normal. Une phrase. Une simple phrase. Mais, à l’idée que je devais avoir l’air conne à la fixer comme ça, les yeux ronds, je me giflai mentalement.

Heu… Oui, oui. Une ou deux fois en dehors des cours. Deux en fait. La vue est superbe. Par temps clair on doit voir loin, non ? Mais je préfère y aller en soirée ou en pleine nuit. Je trouve ça plus joli de regarder les étoiles, souris-je. En journée, le soleil y est trop agressif, tu ne trouves pas ?

Heu… Oui, oui. Une ou deux fois en dehors des cours. Deux en fait. La vue est superbe. Par temps clair on doit voir loin, non ? Mais je préfère y aller en soirée ou en pleine nuit. Je trouve ça plus joli de regarder les étoiles. En journée, le soleil y est trop agressif, tu ne trouves pas ?

Elle me fixais un peu bizarrement mais je ne relevais pas. Quelque part, la désarçonner jouais en ma faveur, ça lui évitais de me rapprocher de trop de ce Laïla devait dire de moi dans ses lettres. Amarrah ne devait pas me connaître. Elle ne devait pas devenir mon amie. Je n'en voulais pas plus. Mais j'avais pris ma décision. Je me concentrais sur elle pour qu'elle évite de se concentrer sur moi. C'était aussi simple que celà. Il n'y avait rien de plus. Je n'allais pas à la tour en plein jour. Je n'y avais été qu'une fois en soirée. Et je ne tenais pas à m'en rappeler:

-Je n'y suis jamais allé en plein jour. J'y suis allée un jour. Enfin, en soiré. Mais je n'ai pas vraiment regardé le paysage...

Ma voix vacilla un peu, et je m'arrêtais pour reprendre ma respiration. Et me calmer. Je repris d'une voix plus posée:

-Mais sinon, oui, le paysage est magnique de là bas. Mais maintenant, celui là me convient.

Je regardais par la fenêtre une nouvelle fois. Cette discussion était glissante. Je me mettais à trop parler de moi. Ce n'étais pas bon. Pas du tout.
Je ne me souviens pas avec exactitude de ce jour là. Je me souviens juste avoir couru comme une folle. Parce que le comportement de Laïla m'avait interpellé pendant plusieur jours mais je n'arrivais pas à mettre le doigt dessus. Je me souviens qu'elle devait m'attendre alors que je passais chez Dumbledore pour recharger mes bonbons. Jeme souviens du flash que j'avais eu. Et de la course folle. Les poumons en feu. J'avais bousculé beaucoup demonde, avait faillis me rompre le cou. Mais j'avais courus. Sans m'arrêter. J'avais mal, et je n'avais pas finis. J'avais grimpé les marches, le plus rapidement possible pleurant sous l'effort, la douleur et la peur. J'avais chaud et je tramblais. Je parvenais a peine à respirer. Et j'avais vu la porte. Mon salut. J'étais persuadée que j'arrivais à temps. Que j'avais été assez rapide...
Je secouais la tête, ejectant mes souvenirs. Je ne devais pas m'en rappeler. Pas maintenant. Je devais m'occuper d'Amarrah, peut être que si elle me disait son mal être, elle se sentirais mieux. Peut être que Laïla me pardonnerais. Peut être... Et elle me fouterai la paix. Enfin.

Je n'y suis jamais allée en plein jour. J'y suis allée un jour. Enfin, en soirée. Mais je n'ai pas vraiment regardé le paysage…

Sa voix trembla sur la fin de la phrase et je tiquai. Que s’était-il donc passé ce soir là ? Se pourrait-il que…

Ça ait un rapport avec la mort de ma sœur ?

Je déglutis. J’avais peur de le lui demander. Peut être parce que je ne voulais pas lui faire plus mal encore ; peut être parce que je ne voulais pas souffrir davantage. C’était à la fois si égoïste et si altruiste. Et en même temps j’avais tellement envie de lui poser la question qui me brûlait les lèvres, me calcinait le cœur.

Qu’est-ce qui s’est passé ce jour là ?

Dumbledore était resté tellement évasif sur les évènements, je savais simplement que ça n’avait rien d’un accident. Et que ça s’était déroulé à la Tour d’Astronomie. Mais je ne savais rien de plus. Et Lyzz’ semblait être la seule personne à pouvoir me renseigner.

Mais sinon, oui, le paysage est magnifique de là bas. Mais maintenant, celui là me convient, continua-t-elle, la voix un peu plus claire.

Je décidai que non. Aucune de nous deux n’était prête pour que je pose la question. Elle n’était pas prête à dire la vérité ; je n’étais pas prête à l’entendre. Ça nous ferait trop de mal, à elle et à moi. Et nous n’avions pas besoin de ça. Je me penchai un peu et observai la vue que m’offrait la fenêtre par où Lyzz’ regardait.

En effet, la vue est jolie, acquiesçai-je en souriant. Dis, tu n’as pas faim ? Tu veux quelque chose à grignoter ?

En effet, la vue est jolie. Dis, tu n’as pas faim ? Tu veux quelque chose à grignoter ?

Je tiquais à la question. J'avais la désagréable impression qu'elle me manipulais. Qu'elle voulais me faire ingurgiter quelque chose de force. Pour se donner bonne conscience, faire sa BA de la journée. Dissimuler dans la conversation une question à l'aire anodine mais à l'effet important. Je n'avais rien à dire, j'utilisais le même procédé. Peut être pour ça que j'avais deviné. Ou alors c'étais juste une coïncidence, mais j'en doutais. Fortement. Je jouais néanmoins le jeu. Lui faire croire qu'elle m'avait pour quelle ne se méfie plus de moi. Une tactique simple, mais qui marche presque toujours. Et c'étaits le meilleur moyen qu'elle me laisse tranquille:

-Pas vraiment, mais je ne cracherais pas une part de tarte au citron... Et toi?

Pas vraiment, mais je ne cracherais pas sur une part de tarte au citron… Et toi ?

Je lui souris de toutes mes dents, heureuse de la voir accepter aussi facilement. J’aurais peut être dû me méfier devant tant de docilité de sa part mais je n’y pris pas garde. J’était bien trop contente qu’elle veuille bien manger. Au moins un peu.

Je me contenterais d’une bonne grosse part de gâteau au chocolat ! ris-je.

J’avais toujours été une véritable gourmande, surtout lorsqu’il était question de chocolat. Je ne pouvais pas résister à l’appel du chocolat. Il m’était impossible de me passer de chocolat.

Heureusement, je ne suis pas encore une grosse dondon ! Mais ça pourrait ne pas durer.

J’allais invoquer gâteux et petites cuillères quand je me stoppai.

Dis, meringuée ta tarte au citron ? demandai-je à Lyzz’ dans un franc sourire.

Je me contenterais d’une bonne grosse part de gâteau au chocolat !

Elle allait invoquer nos commandesquand elle s'arrêta et me fixa, interrogative:

Dis, meringuée ta tarte au citron ?

Je m'étonnais de sa naïveté. Sa partie Serdaigle, j'imagine... Elle devait s'enorgueillir d'avoir réussit à me faire manger quelque chose. Je n'étais pas inconsciente. J'avais bien remarqué l'état de mon corps.Seulement, la faim et le sommeil m'avait déserté. Je prenais garde à m'alimenter un minimum. Même si j'avais toujours l'impressionque j'allais tout rendre à peine une bouchée de nourriture avalée:

-Naturellement, répondis-je avec un sourire.

Pour moi, une tarte au citron ne pouvait qu'être meringuée.

Dans un sourire, Lyzz’ me répondit :

Naturellement.

Je lui souris en retour et passai commande dans un geste fluide de la main. Les desserts apparurent, posés sur de jolies petites assiettes en porcelaine à fleurs bleues et violettes. C’était joli, pas vraiment à la dernière mode en matière de vaisselle, mais je trouvai ça mignon. Et puis, on n’était pas vraiment là pour discuter des fleurs dessinées à la main sur la porcelaine. Je m’empêchai de penser au fait que Lyzz’ me menait sûrement en bateau et lui tendis une cuillère.

Attention, tu manges tout ce qui se trouve dans cette assiette. Ni le quart, ni la moitié. Encore moins les trois quart. Pas même le neuf dixième ! Tout. En entier.

Je plissai les yeux, la fixant.

Et j’te surveille.

Je posai la cuillère à côté de sa main et pris la mienne. Mon gâteau au chocolat recouvert de crème anglaise n’attendrait pas, lui. J’enfournai avec plaisir une bouchée et soupirai de contentement.

Mmh, délicieux. Comment est ta tarte ?

Ne pas trop lui laisser le temps de réfléchir. Ne pas laisser le silence s’installer. C’est toujours plus effrayant.

Attention, tu manges tout ce qui se trouve dans cette assiette. Ni le quart, ni la moitié. Encore moins les trois quart. Pas même le neuf dixième ! Tout. En entier. Et j’te surveille.

Ma poigne se serra sur l'assiète. Pour qui elle se prenait à me parler comme ça? Elle n'étais pas ma mère. Ni mon père. Et elle ne m'était pas encore assez supérieur pour pouvoir me donner des ordres. Elle avait de la chance que mes mains soient prises sinon, je ne sais pas ce dont j'aurais été capable. J'atteignais mes limites. Je me forçais au calme.

La puissante odeur de sucre me donnait la nausée. Malgré tout, l'odeur du citron m'alêchais. J'étais partagée entre répulsion et envie. Je posais mon regard sur elle et retient un haut le coeur alors que je la voyais engloutir une part de son gâteau au chocolat. Tout simplement répugnant. Pas elle, mais qu'est-ce que j'y pouvais moi? La voir se goinffrer devant moi alors que je n'avais pas du tout faim me dégoûtais. Mais je n'avais pasle choix, c'étais le prix à payer pour avoir la paix.
Doucement, je pris ma cuillère et pris un morceau.
Le contraste sucré/amer me fit frissonner mi de dégoût mi de délice. Je souvenais que j'aimais ça. Avant. J'en rafolais, même. Aujourd'hui en manger était limite une corver:

Mmh, délicieux. Comment est ta tarte ?

"Je sais pas" était la première réponse qui percutait mon esprit. Je la retint pourtant. Je devais jouer fin:

-Pas mauvais, souris-je.

Et ce n'étais pas faux...

Pas mauvais.

Ouais. On dit ça quand on sait pas quoi dire d’autre. Ma mère détestait quand on lui disait que ses plats étaient « pas mauvais ». Mais je suppose que je devrais m’en contenter.

Je notai que Lyzz’ avait eu un peu de mal à la première bouchée. J’aurais presque eu peur qu’elle renvoie tout dans l’instant si je n’avais pas appris qu’elle savait se tenir. Tout retenir. C’en était même effrayant. Je me demandais comment elle arrivait à tout laisser à l’intérieur sans exploser, au moins une fois de temps en temps. Elle agissait comme un véritable robot. Monter le bras, enfourner, descendre le bras, piquer dans son assiette. Et elle recommençait. Des gestes lents, précautionneux. Et par-dessus tout, elle semblait dégoutée comme jamais.

C’était peut être pas une bonne idée, finalement.

Les yeux fixés sur ce qui restait de mon gâteau dans mon assiette - c’est-à-dire pas grand-chose -, je posai ma cuillère sur la table.

Et… hum, commençai-je maladroitement. Ça va, les cours ? Je veux dire, tu arrives à suivre dans cet état de fatigue ?

Je ne savais pas si je devais me féliciter d’avoir sorti une phrase aussi débile ou si je devais directement me fracasser le crâne contre le mur d’â côté. Dans le genre conversation à deux balles, j’étais vraiment la reine. Enfin, peut être que détourner un instant les yeux de toute cette crème et de ce citron l’aiderait à manger. Qui sait ? Autant tout essayer. Si ça marchait, tant mieux ; sinon, tant pis. Je n’étais plus à ça près.

Et… hum. Ça va, les cours ? Je veux dire, tu arrives à suivre dans cet état de fatigue ?

Je ne répondais pas. Qu'elle le prenne mal ou pas, je n'en avais rien a faire. Il fallait que je finisse ma part. Que je reste concentrée. Si j'arrêtaismaintenant, je pourrai jamais terminer cette fichue part. L'idée me tenta un moment, mais je la repoussais.
Bouchée aprés bouchée, j'approchais de mon but. Refoulant la nausée. Je finis par enfin voir le bout de mon calvaire. Je poussais un soupir de satisfaction en déposant l'assiète à côté de moi. Cuillère et porcelaine claquèrent dans le silence omniprésent de la pièce. Je me raidis d'un seul coup, les sens à l'affût. Lorsque je fus persuadée que nous n'avions pas été repérée, je dédaignais enfin répondre à la question:

-Question d'habitude. Je suis une bonne élève. Donc ça va.Et toi, c'est nouveau pour toi non? T'étais où avant?